Traumatologie de la face
Chirurgie maxillo-faciale
Les fractures faciales ont longtemps été traitées par réduction digitale ou sanglante et immobilisation par des ostéosynthèses aux fils associées à un blocage maxillomandibulaire pendant toute la période de consolidation (1 mois à 1 mois et demi).
L’apparition de l’ostéosynthèse rigide par plaques et vis a supprimé cette contrainte et simplifié de ce fait les suites opératoires.
Cette technique d’ostéosynthèse par des minivis et des miniplaques a ensuite été utilisée en traumatologie au niveau de tous les os de la face et du crâne.
Dans le même temps, du matériel adapté aux spécificités de la chirurgie maxillofaciale a été développé.
On divise classiquement la face en 3 étages :
l’étage inférieur, correspondant à la mandibule (seul os mobile de la face)
l’étage intermédiaire, avec essentiellement les maxillaires, les zygomas, les os propres du nez
l’étage supérieur, avec les confins craniofaciaux (jonction entre la face et le crâne)
Au niveau de la mandibule, on distingue :
les fractures de la portion dentée : symphyse, branches horizontales et angles
– branches montantes, processus coronoïdes
– processus condylaires (dont les fractures sont divisées en 3 types, capitales, sous-condyliennes hautes, sous-condyliennes basses)
les fractures alvéolodentaires (n’interrompant pas la continuité mandibulaire et relevant de traitements orthopédiques).
Au niveau de l’étage intermédiaire, on distingue principalement :
Les fractures zygomatiques (anciennes fractures du malaire)
les disjonctions craniofaciales (Le Fort I, Le Fort II et Le Fort III)
les fractures des planchers orbitaires
les fractures des os propres du nez
Au niveau des confins craniofaciaux, on distingue :
les fractures du 1/3 latéral orbitofrontal
les fractures du 1/3 médian (paroi antérieure et/ou postérieure des sinus frontaux)
les fractures ethmoïdales
Les 2 dernières comportent un risque de brèche ostéoméningée
Les associations lésionnelles sont très fréquentes. Elles correspondent :
– une fracture symphysaire et des fractures condyliennes bilatérales,
– une fracture d’un angle et une fracture de la branche horizontale controlatérale,
– une fracture d’un angle et une fracture parasymphysaire controlatérale (au niveau de la canine)
soit à l’association de plusieurs ou de toutes les fractures Le Fort I, Le Fort II et Le Fort III
soit à l’association de fractures siégeant au niveau des différents étages de la face.
La mandibule est soumise à 3 types de forces :
des forces de compression, situées le long du bord basilaire, d’un angle à l’autre, et ayant tendance à rapprocher les fragments fracturés l’un de l’autre
des forces de traction, situées le long de la région alvéolaire, également d’un angle à l’autre, et ayant tendance à écarter les fragments fracturés
des forces de torsion, situées au niveau de la région symphysaire, et ayant tendance à provoquer une rotation des fragments l’un par rapport à l’autre
Les forces de compression et de traction s’annulent le long d’une ligne allant de la partie basse de la branche montante au point médian du bord basilaire. Cette ligne correspond anatomiquement à la ligne oblique externe.
Après réduction d’une fracture mandibulaire, les fragments osseux ne doivent pas être fixés entre eux au hasard, mais en réalisant une ostéosynthèse basée sur les règles de la biomécanique mandibulaire. On recourt pour cela à une ostéosynthèse rigide, monocorticale, et placée de telle manière que les forces s’exerçant sur elle soient nulles .
Il faut donc positionner les plaques en fonction de la topographie du trait de fracture :
au niveau des angles et des branches horizontales, une plaque située sur la ligne oblique externe suffit
au niveau symphysaire, 2 plaques sont nécessaires : l’une basilaire sur le prolongement antérieur de la ligne oblique externe, l’autre juxtaapicale du fait de la présence des forces de torsion. Cette dernière peut être remplacée par une contention orthopédique sous forme d’un arc maxillaire.
L’étage intermédiaire et les confins craniofaciaux répondent à des règles biomécaniques plus simples.
Elles sont liées à la présence de structures de résistance en continuité avec l’étage intermédiaire et le crâne:
les piliers de résistance craniofaciaux (piliers frontaux, zygomatiques, maxillaires et canins)
les arcs craniofaciaux (maxillaires antérieurs et postérieurs, zygomatiques et parties antérieures des arcs fronto-occipitaux et latéraux supérieurs)
Ces règles biomécaniques sont moins contraignantes lors de l’ostéosynthèse des fractures de l’étage intermédiaire de la face, du fait de la structure cavitaire de cette région et de l’absence de mobilité des os qui la constituent. Le but de l’ostéosynthèse rigide est alors simplement de rétablir la continuité de ces arcs.
Dans la majorité des cas l’ostéosynthèse est réalisée par voie endobuccale.
Un abord cutané peut être utilisé en cas de plaie en regard du foyer de fracture et chez le sujet édenté et âgé.
Chez l’enfant, en denture lactéale, la présence des germes dentaires contre-indique l’ostéosynthèse par plaques. En denture mixte, elle devient progressivement possible.
Les fractures des angles mandibulaires peuvent être ostéosynthèsées avec une plaque placée :
soit sur la ligne oblique externe
soit sur la margelle rétromolaire
Cette dernière position facilite la mise en place des vis car les trous de la plaque, alors presque horizontale, sont directement accessibles par voie endobuccale.
Dans l’autre position il faut, par contre, recourir à un vissage transjugal.
Les fractures des branches horizontales de la mandibulaire sont ostéosynthèsées par une plaque située sur la ligne oblique externe et donc sous l’émergence du nerf alvéolaire inférieur.
Les fracture de la région symphysaire peuvent être traitées avec une plaque basilaire et un arc remplaçant la plaque juxta-apicale.
Les fractures sous-condyliennes hautes et condyliennes basses sont de plus en plus synthèsées avec de petites plaques de formes adaptées. L’intervention est conduite soit par voie cutanée soit par voie endobuccale (avec vissage transjugal) .
Certains traits de fracture très obliques réalisent parfois un clivage des tables externe et interne de la mandibule qui peut être ostéosynthèsé par 2 ou 3 vis bicorticales.
En cas de fractures plurifocales, il faut réduire les 2 fractures, immobiliser les fragments osseux par un blocage maxillomandibulaire puis commencer par synthéser la fracture la moins déplacée et la plus antérieure.
Ces fractures n’ont pas de répercussion sur l’occlusion dentaire.
Les fractures simples sont réductibles par traction percutanée avec un crochet à zygoma.
Les fractures plus complexes sont instables et doivent être ostéosynthèsées.
Leur abord est alors variable :
cutané (dans les plis de la patte d’oie)
endobuccal vestibulaire supérieur ou parfois sous-ciliaire.
Leur stabilisation est d’abord assurée par une plaque arciforme au niveau du pilier frontozygomatique. Sa forme doit être parfaite pour positionner correctement le zygoma dans les 3 plans de l’espace. En utilisant une plaque de 0,6 mm il est possible de modifier légèrement la réduction après la synthèse.
Si nécessaire on complète le montage par une plaque (en L ou J) au niveau de l’apophyse pyramidale (pontant alors d’éventuels fragments) et une autre au niveau du rebord orbitaire inférieur (remplacée par un fil d’ostéosynthèse lorsque les fragments sont très petits).
Ces factures complexes sont secondaires à des traumatismes violents. Elles s’accompagnent d’un trouble occlusal. En dehors des formes peu déplacées, elles sont traitées par ostéosynthèse de tous les traits de fracture au niveau des piliers de la face, après blocage maxillomandibulaire peropératoire.
La disjonction craniofaciale - Le Fort I
sépare le plateau palatodentaire des maxillaires (elle n’est donc pas une vraie disjonction craniofaciale). Son traitement comporte :
un abord vestibulaire supérieur bilatéral
une réduction et un blocage maxillomandibulaire en bonne occlusion
une ostéosynthèse par 2 plaques de chaque côté (en forme de J et L)
La disjonction craniofaciale - Le Fort II
sépare les maxillaires et les os propres des zygomas en dehors, et du crâne en haut. Son traitement similaire comporte :
un abord vestibulaire supérieur bilatéral éventuellement complété par un abord sous-orbitaire
une réduction et un blocage maxillomandibulaire en bonne occlusion
une ostéosynthèse par une plaque de chaque côté (en forme de J et L) au niveau des cintres zygomatomaxillaires
inférieurs
La disjonction craniofaciale - Le Fort III
sépare les maxillaires, les zygomas et les os propres du crâne.
Son traitement similaire comporte :
un abord cutané canthal externe dans les plis de la patte d’oie
un abord cutané canthal interne
éventuellement un abord vestibulaire supérieur bilatéral (inutile en cas de Le Fort III exclusif)
– une plaque droite au niveau de chacun des cintres zygomatomaxillaires ;
– une plaque droite au niveau de chacun des piliers frontozygomatiques ;
– une petite plaque droite (ou un fil) au niveau des canthi internes ;
– une plaque en Y nasofrontale.
Les associations lésionnelles
(Le Fort I, Le Fort II et Le Fort III) sont extrêmement fréquentes. Leur traitement associe les abords et ostéosynthèses de chacune de ces lésions.
Elles sont très variées tant en ce qui concerne leur topographie que leur possible association à une brèche ostéoméningée. Toutes sont abordées par scalp bitragal. L’utilisation de plaques à ce niveau n’est pas systématique, de nombreux chirurgiens utilisant des synthèses aux fils invisibles et souvent plus adaptées à la voûte du crâne.
Les lésions du 1/3 latéral
ne s’accompagnent que rarement de brèche ostéoméningée.
Elles font l’objet :
d’une réduction sanglante
d’ostéosynthèses multiples, selon la topographie des traits de fracture, avec de petites plaques de 0,6 mm d’épaisseur le plus souvent droites
Les lésions du 1/3 médian
concernent les sinus frontaux et touchent :
soit la paroi antérieure (alors sans brèche)
soit les parois antérieure et postérieure avec une brèche ostéoméningée
Les fractures isolées de la paroi antérieure sont réduites et ostéosynthèsées par des fils ou des petites plaques.
Les fractures des 2 parois sont traitées par :
crânialisation des sinus frontaux (ablation de la muqueuse sinusienne, résection de la paroi postérieure, obstruction des conduits frontonasaux)
suture de la brèche durale
reconstruction du galbe frontal par ostéosynthèse des fragments de paroi antérieure ou remplacement par des greffons corticaux externes pariétaux postérieurs s’ils sont trop petits pour être utilisés
ostéosynthèse associant des miniplaques et des fils d’ostéosynthèse.
Toutes les fractures ouvertes dans la cavité buccale nécessitent la mise en route d’une antibiothérapie pendant une semaine et la poursuite de soins buccaux (sous forme de bains de bouche) une quinzaine de jours. Une alimentation semi-liquide puis molle de quatre semaines est également nécessaire (sauf pour les fractures des confins craniofaciaux). Les complications (insuffisances ou défauts de réduction, déplacements secondaires…) sont exceptionnelles si les règles des ostéosynthèses faciales sont respectées.
Centre de Chirurgie maxillo-faciale
et de stomatologie de Mâcon
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Centre de Chirurgie maxillo-faciale
et de stomatologie d’Arnas
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